C'était pas forcément mieux avant
Bonjour Msieudames,
Punaise, vous êtes top, franchement, top.
Plus d'un an que je vous largue, sans nouvelles, sans rien, même pas au revoir, même pas z'inquiétez pas, tout va bien (ou presque). Donc merci. Je me sens un peu comme Jean Dujardin quand il a reçu le Golden Globe, toussa toussa.
Donc, la dernière fois où j'ai posté des messages sur ce blog, c'était l'avent de Noël, mais pas cuilà de Noël, l'autre avant. Ouais, l'avent d'avant. Suivez un peu, spa compliqué...
C'était le temps où on vivait encore à Narbonne, dans le sud, au pays du vent.
C'était le temps où il fallait faire entre 3 et 5 heures de route (selon la voiture utilisée) pour venir voir famille et amis.
C'était le temps où mon Pou était gendarme mobile, où il partait "travailler" dans les îles trois mois par an, il faisait des trucs trop chiants : de la rando, des visites, de la plongée, nager avec les raies, les requins, bronzer sous les cocotiers avec ses potes, faire des tournois de pétanque. Il revenait avec des paréos et des tatouages, et pour se remettre, il avait un mois et demi de vacances. C'était dur.
C'était le temps où on devait descendre les nazes au parcach, s'habiller dans le sas, mettre double, triple couche en hiver, à cause de ce putain de vent sa race, se cogner les 3 étages, attendre dehors quand c'était quelqu'un que les nazes ou nous on n'aimait pas, entrer vite et se précipiter jusqu'au banc protégé du vent, et papoter pendant des heures, de tout et de rien, en regardant les chiens s'éclater.
C'était le temps où on allait se promener "au jardin", le jardin étant le parc national des Corbières. On l'a fait en long, en large, en travers.
C'était le temps où on disait, tiens, qu'est ce qu'on mange ? Et mon Pou disait : je cuisine ! et il appelait Allo Pizza.
C'était le temps où il y avait du soleil dehors, souvent, voire tout le temps, mais c'était le temps où j'étais loin. Loin de Bordeaux, loin de ma famille, loin de mes amis.
C'était le temps où dès qu'on entendait Bordeaux, ou Gironde, ou Aquitaine, on disait : ahhhhhhh !!!! c'est la maison !!!!!
Depuis, on est partis.
Depuis, la caserne a fermé, mon Pou a changé de boulot. Il est toujours gendarme, mais à la campagne. Pas tout à fait en Gironde, mais à 3 km. Sa première mission, quand on est arrivés ici, ça a été d'élucider un vol de cannes à pêche. Je le jure. Je lui ai fait répéter 3 fois tellement j'y ai croyais pas quand il m'a dit.
Depuis, on habite à la campagne, on a un jardin à nous, les nazes sortent et entrent quand ils veulent.
Depuis, pour aller voir ma famille, c'est un changement radical : les plus proches sont à 11 minutes, les plus éloignés à 1 heure et quart.
Depuis, on va faire les courses en local : au marché le mardi, y a 3 vendeurs : la dame du poulet et des oeufs, le monsieur des fruits et légumes, et celui qui vend de la viande, mais je n'y suis jamais allée. Quand j'arrive, avec mon panier à roulettes que je tire comme les mémés, j'entends chuchoter : "c'est la femme du nouveau gendarme !" on va à la ferme chercher le lait, on se sert, on pose l'argent dans la tirelire, on caresses les vaches et les chiens, on repart. Parfois on pose du pain dur, on prend des oeufs, on pose des gâteaux, on prend un poulet... les gens du coin nous portent des citrouilles, des pommes, des noix, des cèpes, du fromage...
Depuis, on a appris à troquer les bonnets, les doudounes, les écharpes, contre des cirés et des bottes. On patauge dans les champs, les nazes courent comme des dingues.
Depuis, mon appareil photo est sur pied, tout le temps, derrière la fenêtre. J'ai mis des cabanes à oiseaux dans le cerisier, j'observe les geais, les mésanges, les pious de toutes les couleurs qui viennent picorer et qui nous regardent, curieux, mais pas du tout effrayés. L'autre jour, on déjeunait, et au fond du jardin, il y avait 3 chevreuils, qui grignotaient.
Depuis mon Pou est là tout le temps. Toutes les nuits, tous les midis. Il a 2 jours de repos par semaine. Il ne part plus en déplacement.
Depuis on dit : tiens, on va manger chez les parents ce soir ? Et on y va.
Depuis je respire. Je suis rentrée.
Narbonne, franchement, y avait des bons côtés, mais je regretterai vraiment pas grand chose.
J'y ai passé presque 10 ans, je me suis toujours sentie une étrangère.
Ca fait à peine plus de 6 mois qu'on est là, je me sens à la maison.
Allez les gens, c'est pas tout ça, mais faut qu'je file.
;-)